J’aime le weekend : me prélasser dans mon lit, traîner en pyjama toute la journée, jouer avec mon chien, embêter Wyatt, passer du temps avec mes parents. Qui a dit que les jeunes ne savaient pas profiter des plaisirs simples de la vie ? Ce dimanche est exactement comme je les aime. J’ai désactivé mon réveil et les rayons qui filtrent à travers mes volets fermés peinent à me sortir du sommeil. J’attends d’être sûre de ne plus pouvoir grappiller quelques minutes de sommeil en plus, pour me lever. Je ne regarde même pas l’heure sur mon radioréveil, car cela n’a aucune importance. De même, je garde mon pyjama avec son beau motif de petits hiboux qui me donne l’allure d’une fillette, mais qui est tellement confortable.
Je sors dans le couloir pour rejoindre la cuisine, et je suis rejointe par une autre tête blonde. Une telle synchronisation, ça ne s’invente pas. Je souris à sa petite tête endormie qui me fait toujours craquer. Je réponds à son accolade en la serrant brièvement contre moi. Je dépose un baiser sur le sommet de sa tête avant de la relâcher. Bonjour, poupée. Son petit surnom me vient naturellement, il faut dire qu’il lui correspond à merveille.
On continue le chemin ensemble jusqu’au rez-de-chaussée où se trouvent nos parents. Je remarque leur tenue, inappropriée pour la définition que je me fais d’un dimanche matin et échange un regard interrogateur avec ma sœur. Face à notre incompréhension, notre père nous éclaire. Le déjeuner chez les Fordson. La lumière se fait enfin, et le soulagement de ne pas avoir à les accompagner. A peine le temps de se dire bonjour, qu’ils nous laissent seules.
Nous arrivons finalement dans la cuisine, le graal pour mon estomac affamé.  C’est pas l’tout mais j’ai faim, moi ! Je ris, cette remarque étant typique de ma cadette. Mais je ne suis pas en reste et la suis dans sa fouille des placards. Nous sommes autant des ventres à pattes, l’une que l’autre.  Tu veux manger quoi ?J’hésite à manger mon petit-déjeuner, ou à attaquer directement par le déjeuner, vu l’heure avancée. Mais je sais que pour Wyatt, le petit-déjeuner est sacré, quel que soit l’heure. Je décide donc de la suivre, et nous remangerons plus tard notre déjeuner, même si l’heure n’est pas adaptée. Tartines, Nutella, œufs brouillés et jus de fruits pour moi. Je me poste d’ailleurs devant le frigo, pour sortir tout ce dont j’ai besoin. Il te faut quelque chose ? Je lui demande avant de refermer la porte, tandis qu’elle sortait les aliments qui ne se conservent pas au frais.

La confection du petit-déjeuner est en marche et l’on peut voir que c’est presque une routine pour nous deux. On se répartie les tâches naturellement : le frais pour moi, le sec pour elle. Je m’occupe ensuite de la vaisselle, nous sommes des jeunes filles civilisées tout de même, malgré nos appétits de petites ogresses. D’ailleurs mes envies semblent lui convenir puisqu’elle ne souhaite rien de plus. Il n’y a pas que physiquement que nous nous ressemblons, mais aussi dans les goûts.
Il y a tout de même des domaines ou je dois le reconnaître, elle est meilleure que moi, comme la cuisine. Enfin, je ne l’ai jamais vue comme une concurrente, malgré notre faible différence d’âge, Wyatt a toujours été ma petite poupée, dont je suis fière de dire qu’elle est ma sœur. Pour en revenir à la cuisine, je me charge des tartines grillées qui demande tout de même un savoir-faire. En effet, elles doivent être croustillantes, sans pour autant être carbonisées, et si possible garder de leur moelleux. Un véritable art. Je remplie deux grands verres de jus de fruit que je place devant chacune de nos assiettes. Tout semble prêt, et je m’installe sur une des chaises le temps que Wyatt finisse la cuisson des œufs. Elle me rejoint après nous avoir servie. Bon appétit, très chère. Merci, vous aussi. Je rigole, après avoir pris un ton cérémonieux pour lui répondre. J’allais l’imiter en prenant une bouchée d’œufs, mais je m’arrête en la voyant se brûler. Bon dieu, c’est chaud ! C’est bon mais c’est chaud ! Je lève les yeux au ciel, un sourire aux lèvres tout de même. Je préfère préparer ma tartine de Nutella, le temps que mes œufs refroidissent un peu.
Un aboiement à l’extérieur de la maison attire mon attention, et je me lève pour aller ouvrir la porte d’entrée. Leïko rentre en courant dans la maison, avant de me faire ma fête. Bah alors, mon gros bébé. Ils t’avaient laissé dehors ? Je retourne dans la cuisine, où il me suit, me dépassant même pour dire bonjour à sa deuxième maîtresse. Regarde qui voilà. Heureusement, on l’a bien éduqué et il ne tente pas d’attraper la nourriture posée sur la table, qui est pourtant à sa hauteur vu sa grande taille. Je pensais aller à la plage cet après-midi, pour qu'il se dégourdisse les pattes. Ca te dit ? Je reporte mon attention sur ma sœur après m'être rassise, pour connaitre sa réponse. Rester à la maison et ne rien faire de la journée est très tentant, mais une petite balade pourrait aussi être agréable avec ce beau temps.

Les matins en famille sont une habitude que je ne suis pas pressée de quitter. Et je suis heureuse, bien qu’étant à l’université de vivre encore chez mes parents. Evidemment cela a aussi ses inconvénients, surtout à mon âge. Mais les avantages en valent le coup. Et ce matin fait partie des petits moments que je savoure. Certes mes parents sont sortis, mais j’ai ma petite sœur et notre adorable Leïko, qui ne devrait pas tarder à faire son apparition, avec moi, ce qui me comble déjà.
D’ailleurs Wyatt fait son numéro, une vraie comique cette petite. En bonne grande sœur que je suis, je me moque d’elle. Celle-ci me répond par une tape sur le bras de sa serviette. Où est donc passé le respect pour ses aînés ? Je lui fais des gros yeux, mais je ne peux contenir mon sourire en la voyant boire pour faire passer la brûlure. Je suis interpelée par les aboiements du chien de la famille. Je m’empresse de le faire rentrer et celui-ci me remercie en me saluant comme à son habitude : un gros câlin à sa façon. Toujours soucieux d’être équitable, il réserve le même traitement à Wyatt. Elle commet l’erreur de s’accroupir et je ne retiens pas mon rire cette fois en la voyant tanguer, avant de retrouver son équilibre. Il faut dire que notre « bébé » représenta bien la famille des akita. Assis. Bien éduqué, il obéi sans broncher.
Je propose alors une balade à la plage. A voir toute l’énergie contenu dans cette grosse boule de poil, je me dis qu’une sortie lui ferait du bien. Et puis je n’ai pas forcément le temps durant la semaine de l’amener en balade, je profite donc du weekend pour me rattraper. Bien sûr que ça me dit. Je ne pensais pas qu’elle dise non, à moins qu’elle ait déjà quelque chose de prévu dont elle ne m’ait pas parlé. Parfait.
Je m’attèle ensuite de nouveau à mon petit-déjeuner, dont l’odeur me fait saliver. Je ne connais rien de plus agréable que l’odeur des œufs brouillés le dimanche matin. J’ai presque fini mon assiette quand je reprends la parole. Ton stage c’est bien passé, hier ? Bien qu’étant le weekend, nous ne nous sommes vues que rapidement la veille, après qu’elle soit rentrée de stage, chacune occupée de son côté. Je profite donc de ce moment tranquille pour lui poser la question. Je suis fière que malgré son jeune âge, elle s’investisse déjà autant pour son futur.

Dans cette bonne ambiance de dimanche matin, j’en profite pour échanger avec ma sœur sur ses activités. On n’a toujours moins de temps durant la semaine pour ce genre de chose. Et encore, heureusement que je vis encore chez mes parents, je ne suis pas encore prête à me passer de la présence quotidienne de mes parents, ma sœur et notre chien.
Wyatt réalise en ce moment un stage dans une grande entreprise locale. Rares sont les lycéens qui se préoccupent déjà de leur avenir, mais ma poupée n’est pas comme la plupart des lycéens. Bien que cet avis ne soit pas totalement objectif. Bien, oui. J’attends qu’elle boive, continuant à manger de mon côté, avant qu’elle ne développe plus. J’ai eu un rendez-vous surprise avant l’un des patrons de l’entreprise. Il semble réellement s’intéresser au suivi de mon stage ce qui m’étonne. Je veux dire, c’est un grand PDG, je ne suis qu’une stagiaire. Je soulève un sourcil, étonnée mais surtout fière d’elle. Je ne doute pas une seule seconde de son investissement et je suis heureuse que cela se remarque, jusqu’au PDG de cette entreprise. Je suis fière de toi. Bien sûr qu’il a remarqué le bon travail que tu fais ! Je réponds avec enthousiasme avant de la laisser continuer. Bien qu’encore endormie, je la vois s’éclairer lors de son discours, preuve de la passion qu’elle y met. Son ardeur a dû les convaincre qu’elle était un bon élément malgré son statut de stagiaire et son jeune âge. Il m’a proposé plusieurs options : faire une deuxième semaine au service communication avec plus de tâches ou bien changer de service. Il m’a parlé de le suivre à la direction ou son frère au service finances et compta. Il m’a aussi parlé du service publicité et celui des relations internationales ce qui serait vraiment cool, je pense surtout que je parle déjà deux langues, merci maman et je me débrouille plutôt bien en espagnol. … Enfin bref, trop de choix qui me semblent tous aussi intéressants les uns que les autres. Wouah ! Tu as vraiment fait bonne impression à ce que je vois. Tu as déjà une préférence ? C’est vrai que grâce à maman, tu aurais déjà un avantage au service international, et toi qui aimes les langues, cela devrait t’aller comme un gant. Ou alors découvrir un domaine que tu connais moins, pour t’en faire une idée plus précise ? Alors que dans la plupart des stages les tâches allouées peuvent être très limitées et répétitives, Wyatt se retrouve avec une ribambelle de propositions. Il m’a donné son mail, je dois lui faire part de ma décision avant demain soir pour qu’il organise tout ça. Je finis ma tartine le temps qu’elle parle et m’essuie avec la serviette. Tu as besoin d’aide pour faire ton choix ? Enfin, je ne sais pas trop comment t’aider, ce n’est pas vraiment mon domaine le commerce, mais je peux toujours essayer. Je ris, bien que ma proposition soit sérieuse. Je peux l’aider à évaluer les pours et les contres, par exemple.